La radio en ligne ne date pas de l’arrivée d’internet, l’histoire nous enseigne qu’elle était appréciée d’une dictature. En France, il est bien difficile de promouvoir la radio numérique terrestre RNT en DAB+, car elle se heurte à la facilité de la diffusion radio en ligne. Si je propose une réflexion au travers de « Devenir une radio numérique chrétienne premium », ce n’est pas contre la radio en ligne, mais parce que je crois à l’importance de la diffusion broadcast (DAB et/ou FM) et que les appels aux candidatures en France permettent l’opportunité d’étendre la diffusion de la Bonne nouvelle par ce canal.
« Celui qui ne connaît pas l’histoire est condamné à la revivre » disait Karl Marx
En scrutant l’avenir, on risque d’en oublier le passé.
Lors du dernier salon de la radio 2017 à Paris, un hébergeur de webradio nous a annoncé qu’avant 2050, toutes les diffusions radio se feront sur Internet. Cela m’a fait froid dans le dos ! Après avoir entendu parler d’avenir, laissez-moi vous parler d’histoire !Radio en ligne en URSS dans les années 1930
Remplacer la diffusion broadcast par une diffusion en ligne me rappelle les années sombres des dictatures européennes dans les années 1930. La radio était déjà filaire sous la dictature communiste d’URSS alors que la TSF – radio sans fil – se développait dans le monde.
La radio a longtemps eu cet avantage d’être non-filaire, ce qui permet aisément à l’auditeur de choisir son programme. Mais entre 1920 et 1940, le prix d’un poste de radio était trop élevé pour être accessible à tous. L’U.R.S.S. remédia a ce problème en proposant des postes à faible prix, qui à défaut de ne pouvoir capter les ondes électromagnétiques, étaient en mesure de recevoir une station radio par un câble auquel il fallait s’abonner9. Ce système – que seuls les soviétiques ont testé – facilitait donc la démocratisation de la radio ; mais cette accessibilité n’était pas anodine … Le câble ne permettait de capter qu’une seule chaîne de radio, la radio nationale qui était un outil de propagande puissant. Cette absence de choix permettait au régime de contrôler aisément la population, d’autant plus que le système filaire était privilégié et s’étendait de l’ouest à l’est du territoire. Néanmoins, cela n’empêchait pas la radio sans-fil à se développer au sein de la Russie soviétique. Les émissions vers l’étranger se faisaient dans onze langues, et bénéficiaient d’un émetteur d’une puissance alors unique en Europe : 500kW ; Paris, Berlin et Londres ne dépassaient pas les 150kW. |
Utilisation de la radio en Allemagne
Médias sous contrôle.
Un grand homme des médias (pour le malheur de son peuple) a été impressionné par cette propagation radio en ligne lors de sa visite en URSS après la signature du Pacte germano-soviétique en 1939. Cet homme, c’était le propagandiste nazi Goebbels. Il avait lancé la fabrication des postes Volksempfänger pour que le peuple puisse écouter et recevoir des nouvelles de la grande Allemagne. Ces postes avaient la caractéristique de capter sur un petit rayon, ce qui ne permettait pas aux allemands de capter les radios internationales. Les dictatures aiment contrôler les médias. Elles favorisent les outils techniques qui le permettent.
Un seuil de propagande tolérable par l’auditeur !
La propagande nazie a très vite compris que si elle diffusait de 30% de propagande, les auditeurs fuyaient l’écoute. En restant en dessous de ce seuil, elle pouvait faire passer leur persuasion afin de formater en douceur le peuple allemand en lui distillant des informations venant de la grande agence de presse que le ministère Goebbels avait créée, en centralisant les autres agences et en modernisant ses moyens de communication.
Contrôle à petites doses.
Bien évidemment, la France n’est pas la Chine, l’Arabie saoudite ou la Corée de Nord. Nous avons la liberté d’expression. C’est vrai, mais une liberté surveillée par les champions du Big data, les Google, Facebook, Apple et Amazon pour les plus connus. C’est une liberté qui doit passer par les canaux fournis par les 4 grands opérateurs français (Orange, SFR, Bouygues et Free). Au salon de la radio 2017, plusieurs radios se sont plaintes qu’elles ne maîtrisaient plus la qualité sonore de leur contenu sur certaines plateformes internet. À quand, un contrôle sur le contenu ? Contrôle qui arrivera bien sûr très doucement à l’image de la grenouille que l’on ébouillante en faisant monter lentement la température. Il y a, actuellement, des signaux faibles qui permettent de sentir que les libertés sont de plus en plus contraintes avec la justification de la lutte contre le terrorisme. En effet, pour lutter contre le terrorisme physique et intellectuel islamiste, on limite les libertés publiques pour toutes les confessions. Des lois qui cherchent à contrôler la communication dans son ensemble arrivent petit à petit dans notre arsenal législatif. La neutralité du net est un sujet d’inquiétude aux États-Unis après la nomination du nouveau président de la FCC (équivalent du CSA et de l’ARCEP en France).
Allons-nous accepter cet état de fait ?
Que peuvent faire les petits diffuseurs, notamment les diffuseurs chrétiens ?
Ne laissons pas la main aux puissants. Si l’Internet est un formidable tremplin pour débuter une radio en ligne ou une activité de communication, il est important d’être maître de sa diffusion sans passer totalement par les plates-formes Internet qui défendent leurs intérêts financiers et la liberté d’entreprendre plutôt que les intérêts culturels et la liberté d’expression.
Petites radios locales : vitalité et proximité
Les petites radios locales sont des radios d’une grande vitalité, car elles permettent des relations qui ne sont pas noyées dans l’immensité du Web. Les divers sondages montrent aussi que les radios hertziennes (FM et/ou DAB) ont des audiences sur internet meilleures que les radios en ligne pure players. Si la diffusion sur plusieurs supports et avec des différés dans le temps est l’avenir de la radio, l’abandon de la diffusion hertzienne serait une véritable catastrophe pour la liberté d’expression. Le challenge n’est pas aisé car le CSA pèche par excès de lenteur en mettant des charges complexes sur les opérateurs et les diffuseurs. Mon propos n’est pas de défendre coûte que coûte la diffusion numérique contre la radio en ligne, mais plutôt la diffusion broadcast qui garantit une liberté de parole qui peut être remise en cause dans l’univers fortement changeant du net.